mercredi 12 mai 2010

Interview : Johnny Depp au pays merveilleux de Tim Burton

A l'occasion de la sortie d'"Alice au pays des merveilles", AlloCiné a rencontré Johnny Depp, qui nous parle du personnage de Chapelier fou, de sa collaboration avec Tim Burton et de son amour pour la littérature.
AlloCiné : C'est la septième fois que vous collaborez avec Tim Burton. Comment avez-vous réagi quand il vous a proposé le rôle de Chapelier Fou ?


Johnny Depp : C’est toujours le même plaisir tout frais de travailler avec Tim Burton, ce n’est même plus du travail, juste de l'amusement pur ! D’ailleurs il aurait pu me proposer n’importe quel rôle, même celui d’Alice, j’aurais dit oui ! Mais c’est vrai qu'avoir la chance de pouvoir interpreter le Chapelier fou est un vrai régal. De plus, Tim m’a laissé totalement la liberté de réinventer, repenser ce personnage. Pas question de jouer un petit gars chauve et loufoque comme dans la version de Disney. J’ai pu laisser libre court à mon imagination et créer un personnage hors du commun.


Pouvez vous nous parler du côté "tragique" de votre version du personnage ?

Eh bien oui, il a un vrai dilemme. L’expression “fou comme un Chapelier” provient du taux de mercure utilisé dans la colle employée pour faire les chapeaux et qui rend fou ! Et c’est ceci qui est tragique : la vision que le chapelier a de lui-même, son addiction, sa folie incontrôlable ! Il est physiquement défait et mentalement hors de lui. J’ai vraiment eu plaisir à construire un personnage en conflit avec lui-même, en pleine crise existentielle. C’est presque un homme perdu qui cherche à se retrouver, à se refaire une santé. Mais il perd sans cesse le contrôle de lui même, en raison de sa condition, et peut passer d’un état de légèreté à un état ultra dangereux de rage pure. Ce fut pour moi une etude psychologique fascinante et un personnage très riche à interpréter.

Vous sentez-vous par moments comme un “Johnny au Pays des Merveilles” avec une telle carrière ? Et avez-vous voulu follement le succès et la gloire, comme le chapelier ?

C’est évident que, depuis le début de ma carrière, je me demande comment j’ai pu survivre et arriver jusque là. La vie est folle et totalement imprévisible. Le business du cinema défie toute logique et je ne peux vraiment qu’apprécier ma chance. Evidemment que j’étais plein d’espoirs et de rêves mais je m’émerveille face à tant de réussite. De plus, bizarrement, j’ai vraiment cru qu’après Cry-Baby et Edward aux mains d'argent, ma carrière était finie...

Comment a évolué votre relation de travail et sur le plan personnel avec Tim Burton. Vous étonnez-vous toujours l'un l'autre ?


Je suis toujours à genoux devant le talent de Tim. La difficulté pour moi est de ne pas le décevoir, de créer un personnage qui va le stimuler, l’inspirer. En fait j’essaie juste de ne pas l’embarrasser, c'est un tel génie.


Vous avez une telle panoplie de personnages que ça doit être difficile de se ré-inventer à chaque film...

Oui, parfois c’est assez compliqué d’être totalement “original” et novateur, surtout lorsque je joue un personnage qui a un accent Anglais. Je ne peux m’empécher de penser que je suis trop proche de Captain Jack ou Willy Wonka. Ce n’est pas facile de trouver le ton juste et parfait. Mais c’est justement ce défi qui me passionne, trouver une nouvelle identité jamais essayée.

De tous vos films, quel est celui que vos enfants préfèrent ?

A ma grande surprise, mes enfants adorent Edward aux mains d'argent ! Il ont du mal à accepter que c’est leur papa dans le film mais c’est leur favori. Je crois qu’ils comprennent vraiment ce personnage tragique et solitaire. Ils sentent sa peine intèrieure. Ils ont du mal à voir papa qui souffre derrière le masque d’Edward...

Vous semblez fasciné par la littérature Anglaise du XIXième siècle, entre “Alice”, “Sleepy Hollow” et "Neverland", le film sur J.M Barrie...

J’adore la littérature en général, qu’il s'agisse de J.M. Barrie, Lewis Carroll ou la poésie de Baudelaire, les histoires d’Edgar Allan Poe. C'est un attachement à un univers littéraire dans son ensemble. Mais c’est vrai que le XIXe siècle me passionne, je m'y retrouve totalement. A chaque fois que je lis Les Fleurs du Mal , j’ai le souffle coupé.

A quel âge avez-vous lu Alice pour la première fois ?


C’est amusant car personne ne peut vraiment dire quand il ou elle a lu Alice pour la premiere fois. Je pense que je devais avoir 5 ans environ. Et plus que l’histoire, ce sont tous ces personnages qui m’ont marqué à l’époque. Je parie même que la plupart des gens n’ont jamais lu le livre mais connaissent par coeur cette galerie de joyeux personnages. Qui ne connait pas Alice, la lapin et sa montre, le chapelier fou, la chenille, la chat au sourire énigmatique ? Alice fait presque partie de notre inconscient. Je crois que la dernière fois que j’ai relu Alice et De l'autre côté du miroir, c'était juste un an avant que Tim se lance dans cette mise en scène. Ce fut une lecture très approfondie, j’étais fasciné par le symbolisme du livre. Par exemple il y avait cette lettre M qui revenait sans cesse et on finit par découvrir que c’est une allusion au Mercure, d’où la condition du Chapelier et son addiction au Mercure... C’est passionnant de lire et relire Alice car c’est un monde merveilleux et sans fin que l’on re-découvre à chaque fois.

Vous allez maintenant jouer aux côtés d’Angelina Jolie dans “The Tourist”, pouvez vous nous en parler ?

J’ai adore le film d’origine, un film français comme vous le savez : Anthony Zimmer avec Sophie Marceau. Mon ami Yvan Attal jouait le role que je reprends dans la version américaine. Nous allons tourner essentiellement à Venise. je pense qu'on va être cernés par les paparazzis ! C’est le réalisateur de La Vie des autres, Florian Henckel von Donnersmarck qui en signe la réalisation. Et puis cette année verra aussi la sortie d’un autre projet qui me tient à Coeur : The Rum Diary d’après le roman de mon ami défunt Hunter S. Thompson.


Propos recueillis à Los Angeles par Emmanuel Itier

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